Ce dimanche 11 novembre, une cinquantaine de libertariens belges se sont assemblés à Namur pour fonder le Parti Libertarien. Ils se préparent pour les élections de 2014 afin de porter un message sans concession en faveur de la liberté individuelle et de la réduction du rôle de l’Etat. Les deux années qui viennent seront l’occasion d’une importante activité militante, d’une interpellation régulière du gouvernement et d’un travail pédagogique autour des valeurs libertariennes.
Lors de ce congrès fondateur, les libertariens présents se sont dotés de statuts. Ils ont voté un programme en 10 points et ils ont élu le Bureau Fédéral de leur jeune parti. La présidence a été confiée à Patrick SMETS, docteur en sociologie et militant de longue date. (En savoir plus sur Patrick SMETS)
Article 1 des statuts du Parti Libertarien:
« Le Parti Libertarien est une association politique belge qui oeuvre à la diffusion des idéaux libertariens et à la réalisation d’une société de pleine liberté fondée sur le respect des droits naturels, inaliénables et sacrés des individus. »
Voir la suite des statuts sur le site du Parti Libertarien.
Discours d’ouverture prononcé par Patrick SMETS
Lors de son discours introductif, Patrick SMETS a insisté sur 3 éléments essentiels de la démarche libertarienne.
1) Le Parti Libertarien entend participer activement à la vie politique belge et présenter des listes à chaque élection. Notre objectif premier reste cependant la pédagogie. Nous voulons faire percevoir à chacun qu’il existe une alternative à la sociale-démocratie et au tout-à-l’Etat. La campagne de Ron Paul a parfaitement montré que si on porte un message clair, on est entendu. Même si on sort du mainstream. Notre but est de suivre son exemple. Nous voulons faire sortir le libertarianisme de la semi-clandestinité dans laquelle il est maintenu jusqu’à aujourd’hui et lui offrir une tribune publique. Le programme du Parti Libertarien doit être au service de cet objectif et servir de porte d’entrée aux différents thèmes que nous voulons promouvoir.
2) Le Parti Libertarien militera pour l’annulation de la dette publique belge. La dette publique est à la fois immorale, anti-démocratique et destructrice de richesse. Elle est immorale parce que le contrat passé entre le créancier et le gouvernement porte sur le patrimoine futur des contribuables et non sur celui des électeurs qui en ont bénéficié. Elle est anti-démocratique parce qu’elle bloque la possibilité d’une alternance réelle, chaque gouvernement étant tenu par les engagements pris par le précédent. La dette publique est une institution illégitime au service du statu quo. Enfin, il est matériellement impossible de rembourser cette dette. Si le gouvernement voulait s’engager dans la voie du remboursement, il ne devrait pas chercher 4 milliards pour le budget 2013, mais 30 milliards. Opération politiquement inconcevable. En conclusion, nous plaidons pour une annulation ordonnée de la dette avant de nous retrouver dans la situation grecque.
3) En nous réunissant le 11 novembre, nous ré-affirmons le pacifisme traditionnel du mouvement libertarien. Le Parti Libertarien est un parti de principe qui fonde sa pensée sur le principe de non-agression. Il est essentiel de faire correspondre notre politique étrangère à nos principes intérieurs. Nous profitons donc de ce jour de commémoration de l’armistice pour demander la restauration de la neutralité militaire de la Belgique.
Voir l’intégralité du discours sur le site du Parti Libertarien.
Programme en 10 points
Pour assurer la paix, la liberté et la richesse en Belgique, le Parti Libertarien s’engage à :
2° Recentrer résolument l’État sur ses fonctions essentielles
3° Supprimer tout impôt, taxe et accise autre que la TVA
4° Rétablir le respect absolu des libertés individuelles, civiles et économiques
5° Abolir les privilèges légaux des fonctionnaires, des syndicats et des associations patronales.
7° Garantir la pleine liberté de circulation des biens et des personnes
8° Mettre fin à la prohibition des drogues et à l’hygiénisme forcé
9° Libérer et mettre en concurrence les monnaies
Bravo aux libertariens pour cette première journée!
J’adhère à la plupart des points du programme et je me posais là question. Avez-vous détaillé plus en profondeur les différents points: constat actuel, l’objectif, les raisons,…?
Bien cordialement,
Nous allons entamer prochainement une écriture collaborative des détails du programme. Plus d’informations seront communiquées via ce site.
Le seul point qui me pose problème dans ce programme est l’annulation de la dette publique belge.
Une dette ne peut être annulée que dans un seul cas : lorsque les créanciers marquent librement leur accord. Un parti, même doté de gros sabots, ne peut annuler d’autorité une dette ! En gros, la dette publique est un contrat conclu entre une organisation criminelle mafieuse – l’Etat – et des créanciers tellement confiants dans la capacité des fonctionnaires à pouvoir continuer à extorquer de l’argent à la population qu’ils ont accepté de prêter des euros moyennant des intérêts somme toute fort limités. Je trouve pour le moins paradoxal qu’un parti qui se dit libertarien – qui doit avoir pour ambition d’enlever à l’Etat ses attributs d’organisation mafieuse – propose dans son programme que l’Etat s’attribue, en plus, le droit de renier ses contrats et sa parole donnée (une promesse de remboursement est un contrat). Or, s’il y a bien une chose sacrée dans une société libérale, c’est le respect de la parole donnée, le respect des contrats signés !
Pourquoi d’ailleurs plonger dans ce piège, alors que le point 9 du programme (liberté d’émission et libre concurrence monétaire) contient à lui seul tout ce qu’il faut pour anéantir la totalité de la dette publique belge ? Je rappelle que la liberté d’émission, la fin du communisme monétaire, la fin de l’obligation d’utiliser l’euro – et donc d’emprunter ces euros – pour simplement payer ses fournitures, ses salariés et soi-même, implique qu’il n’existe plus aucune contrainte économique nécessitant de limiter l’inflation sur l’euro. Si les gens peuvent effectuer toutes leurs transactions courantes en monnaies privées concurrentes à l’euro, on peut laisser la BCE imprimer autant de billets de monopoly libellés en euros qu’il faut pour rembourser toutes les dettes publiques !
Dans le contrat, l’Etat promet de rembourser ses dettes. Or l’Etat a emprunté des euros. Il doit donc rembourser des euros. Pas de l’or, ni des bourzoufs : des euros. Il suffit pour lui de rembourser les euros dus pour respecter son contrat. Et nulle part dans ses contrats de prêts n’est spécifié que l’euro doit encore valoir quelque chose à l’échéance. Il peut très bien ne plus rien valoir du tout ! Le risque que la monnaie en laquelle les dettes sont libellées dévalue est d’ailleurs rétribué via l’intérêt offert : le créancier est payé pour assumer ce risque. Il n’y a donc aucune rupture de contrat à rembourser les créanciers en monnaie de singe. Pourquoi alors proposer l’annulation de la dette publique, vu que la seule libre concurrence des monnaies permettrait de facto d’anéantir la totalité de la valeur de cette dette, sans dommage pour l’économie réelle et sans même rompre le moindre contrat signé par l’Etat ?
Vous oubliez un détail, c’est que le contrat passé par l’Etat porte sur des biens qu’il ne peut acquérir que par l’impôt. Tant le gouvernement que le créancier sont parfaitement au courant de cet état de fait. Au regard du droit naturel, le contrat est donc nul et non-avenu. Vous trouverez un approfondissement de ce argument chez Rothbard dans un article que j’ai résumé ici. http://www.contrepoints.org/2012/10/29/102389-rothbard-et-la-perspective-libertarienne-sur-la-dette-publique
Ceci étant la solution que vous proposez est également valable au regard du droit naturel. Pour choisir entre le deux, on ne peut donc se baser que sur des considérations pratiques. Un point qui nous semble important : l’annulation de la dette permet une économie publique de 12 milliards par an et ouvre la possibilité de réduire immédiatement les impôts d’un montant similaire.
Je ne suis pas pas convaincu du tout par la non-validité du contrat au regard du droit naturel. Rappelons que ce contrat n’implique que 2 contractants : l’Etat et son créancier, un spéculateur qui spécule sur le fait que sa créance conservera l’essentiel de sa valeur jusqu’au terme du contrat. Le contribuable, lui, n’a rien signé du tout, et n’est évidemment nullement tenu – au regard du droit naturel – de renflouer l’Etat et/ou son créancier/spéculateur.
Un contrat entre un voleur (l’Etat) et un spéculateur (le créancier – qui peut très bien se considérer comme un « bon père de famille » – qui spécule sur le fait que les milices de fonctionnaires armés parviendront à collecter suffisamment d’argent lors de leurs rapines pour le rembourser à l’échéance) est un contrat comme un autre. Ce contrat inclut notamment une prime de risque, qui rémunère le spéculateur pour le risque (qui n’est pas nul) qu’avant l’échéance, les contribuables trouvent un moyen pour contrer les milices de fonctionnaires. Le risque est très faible, mais cela peut toujours arriver. Si c’est le cas, l’Etat tombe alors en faillite (cessation de paiements) très rapidement. Orthodoxement, l’Etat devrait alors être dissous, ses actifs étant vendus aux enchères pour rembourser quelques miettes aux divers créanciers. Mais si vous souhaitez conserver la structure étatique (point 2 de votre programme), la personne morale (l’Etat) existe toujours, et le contrat existe lui aussi. Au point 3 du programme, je note que vous avez l’ambition de faire fonctionner l’Etat avec les seules rentrées de TVA (ce qui est raisonnable pour les fonctions régaliennes). Mais la TVA est aussi un impôt : il y a donc simple continuité d’un Etat qui prélève l’impôt…
Vous aurez, je crois, beaucoup de mal à faire valoir votre point de vue, de manière juridique, à l’international. Voici à peine quelques semaines, l’Argentine s’est vue saisir un navire militaire (la frégate ARA Libertad, immobilisée au port de Tema, près d’Accra) sur ordre d’un juge ghanéen, qui avait jugé fondée la requête du « fonds-vautour » américain NML (dont le business consiste à racheter à bas prix des créances pourries sur des Etats en faillite, en espérant les faire valider à terme devant les tribunaux). Ces dettes vont poursuivre l’Etat argentin à l’international, et cela tant que cet Etat argentin existera. Voir :
http://www.slateafrique.com/96959/fregate-retenue-au-ghana-les-marins-libres-de-partir
C’est pour éviter concrètement ce genre de problèmes (et aussi pour des pures raisons de principe) que je juge préférable que ce soit la valeur de la dette (la monnaie de l’ex-monopole) qui soit anéantie, car là, aucun contrat n’est rompu. De toutes manières, l’euro représente pour l’essentiel des « bons pour une part de créance sur la dette publique ». Annuler la dette publique signifierait aussi anéantir l’euro, le transformer en « bons pour une part de néant ». Autant donc faire les choses dans le bon sens (juridique) !
Merci pour l’article de Rothbard, intéressant (mais pas définitif !). Et bravo en tout cas pour votre initiative ! Je trouve aussi très positif le fait de laisser la discussion ouverte sur les points de votre programme.
Je ne partage pas votre point de vue sur la validité du contrat, mais il s’agit là d’un débat théorique entre libertariens que nous aurons peut-être l’occasion d’approfondir un jour. (n’hésitez pas à venir nous rencontrer lors des apéro’thbard) Le plus important aujourd’hui est d’ouvrir le débat. Quant aux conditions pratiques de ce défaut, elles devront évidemment être négociées avec un nombre important d’acteurs internationaux.